MIJN TUIN_mon jardin

1er Avril 2023 au 14 Mai 2023

Prolongation jusqu’au 28 mai

 
 

Sur les réseaux sociaux, les influenceuses et les influenceurs vendent la démesure de produits inutiles, la futilité comme l’Omega du sur-mesure. Perdu dans cet océan de déchets, accroché à l’épave de ce qui fut notre intimité, nous attendons, promesse de ces nouveaux messies, d’être secouru par un yacht de luxe. Nous avons décidé de croire dans les superlatifs de notre modernité, mais la seule chose qui nous revient sont ceux des superlatifs climatiques, des bombes sociales ou de la guerre. L’exposition MIJN TUIN_mon jardin déploie les dessins et les sculptures de trois artistes singuliers qui arpentent, chacun à leur échelle, la démesure de notre environnement.

Vincent Anaskieviez dessine méticuleusement des mondes surréalistes. Les formes qu’il saisit avec ses crayons sont issues d’un imaginaire intérieur qui pourrait rapidement devenir chaotique, comme l’hyper activité des images qui nous entourent, si durant de longues heures, des jours, des semaines, Vincent Anaskieviez, en dessinant, ne s’acharnait pas à y mettre de l’ordre. Dans l’ultra précision de son trait, il ringardise l’imagerie numérique, dans les couleurs et la maîtrise de l’assemblage des formes, il apaise et fait aimer un monde plein d’agitation.

Lilian Bourgeat surdimensionne des objets que nous avons tous déjà rencontrés. Un niveau à bulle, un tire-bouchon, un banc public. Ces objets nous sont si familiers que certains sont devenus des émojis dans nos téléphones. Le « sommet » d’un fauteuil de jardin de Lilian Bourgeat dépasse les deux mètres, une paire de bottes ? trois mètres. Ces images/objets surdimensionnés, leur élévation, se déploient à l’échelle de l’architecture. Les rapports de force sont inversés, notre corps tout entier est saisi par des formes que nous saisissions. Dans un monde de superlatif, ou ces objets surdimensionnés pourraient être des enseignes d’hypermarché, ces sculptures sont comme autant de défis lancés aux images. Elles nous rapprochent d’une expérience malicieusement intime et poétique : celle de notre corps. L’expérience de cette matérialité décompose l’image/objet, crée une permutation ; devenu ainsi objet/image dans leur environnement, les sculptures de Lilian Bourgeat perturbent avec humour la lecture de l’échelle et le sens des espaces que nous parcourons : notre individuation.
[Individuation : processus de prise de conscience de l'individualité profonde, décrit par Jung / www.cnrtl.fr]

Laurent Martin est pragmatique, il fait atelier de son environnement. Les villes nouvelles dont il se fait l’architecte sont visionnaires, encore à venir. Elles surgissent de la déconstruction d’objets abandonnés, récupérés, derniers maillons d’une chaine de consommation dont plus personne ne veut. L’utilisation récurrente d’assises désossées, place chaque corps au centre des préoccupations, suggérant à chacun de nous son rôle à jouer dans cette manière d’assoir une forme. Laurent Martin est un optimiste peu enclin à subir les pénuries actuelles ou à venir ; son imaginaire est résilient, prolifique. La démesure des problèmes de l’humanité s’appréhende chez lui avec une accumulation de gestes modestes mais ambitieux, usant de la maquette ou de l’installation monumentale, praticable, sculptant au creux de l’adversité, le potentiel généreux, omniprésent, de chacun d’entre nous.